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Préparer votre ferme pour l’avenir : planifier et parer aux éventualités

Par Jane Robinson

Publié le 31 janvier 2025 • 9 min de lecture

Le monde agricole est soumis aux caprices du climat, comme les sécheresses et les inondations. Il est vulnérable aux soubresauts des marchés et aux perturbations des chaînes d’approvisionnement. C’est un secteur où l’inattendu règne en roi.

On a demandé à quatre pros de la finance comment protéger une exploitation agricole contre les coups durs. Leurs conseils sont particulièrement judicieux et tiennent compte de toutes les circonstances qui pourraient fragiliser votre exploitation.

Darrell McClure est directeur général national de l’équipe Gestion des risques du groupe, secteur agricole, à RBC, pour l’ensemble du Canada. Préparer l’avenir, c’est rester proactif. Cela consiste à assurer la survie de votre exploitation pour l’année, la décennie et la génération à venir. « C’est une autre façon d’envisager la gestion de l’activité et des risques », explique-t-il.

« Certains facteurs sont faciles à maîtriser, mais pour le long terme, il faut vraiment analyser son exploitation en profondeur », observe M. McClure.

Objectifs et risques : faire l’état des lieux

L’art de se fixer des objectifs ne date pas d’hier. Mais comment peut-on passer à l’action dans un contexte de pérennisation ?

Pour M. McClure, les fermes qui prospèrent ont toutes un point commun : elles ont fait un travail de fond pour se fixer des objectifs, envisager différents scénarios et bâtir leur plan d’affaires.

« Établissez vos objectifs, ciblez les plus risqués et attaquez-les un à un », préconise M. McClure. « On ne peut pas tout contrôler, mais cerner les risques et travailler à leur atténuation permet déjà d’avancer. »

Comment donner tout son sens à la pérennisation ? M. McClure suggère aux producteurs d’imaginer différents cas de figure. Que faire en cas de sécheresse ? Et en cas de grève des chemins de fer ? Et si le cours des matières premières dégringole ?

M. McClure encourage les producteurs à se projeter dans ces situations. « Si ces scénarios sont gérables, pensez aux solutions concrètes pour sécuriser votre exploitation : assurances, couverture sur marchandises, préachat des intrants, etc. »

Lorsque les événements vous échappent, rien de plus précieux qu’un bilan et un fonds de roulement solides pour traverser les tempêtes « Il faut que votre exploitation soit résiliente pour tenir le coup face aux imprévus », explique M. McClure.

Finances et planification de la relève : une réflexion essentielle

Votre ferme doit être capable d’encaisser les coups durs, ajoute M. John Arnold. « Prudence en matière d’endettement, rigueur dans la gestion des risques avec les outils existants et recours aux avis de vos conseillers, voilà les clés du succès », explique M. Arnold, agroéconomiste à RBC Financement commercial, précédemment vice-président des Services commerciaux dans le sud de l’Alberta.

Il est difficile d’aborder les aspects financiers de la planification des imprévus sans évoquer également la question de la relève. « Présentez vos objectifs et les attentes générales très tôt aux experts, peu importe la taille de votre exploitation », rappelle M. Arnold.

Le fruit de ces échanges permettra de définir clairement l’avenir de l’entreprise et de renforcer la pertinence des plans de pérennisation.

« Assurer l’avenir, c’est penser aux finances, bien sûr, mais aussi à la gestion et à la relève. C’est primordial », insiste M. McClure. « Les fermes canadiennes sont généralement transmises de génération en génération. Pour maintenir votre activité sur le long terme, vous devez intégrer un plan de relève », explique M. McClure.

Plan d’affaires : responsabilités et reddition de comptes

Pour Evan Shout, la pérennisation est un concept multidimensionnel. Chef des finances de Hebert Group, il veille sur la santé financière d’une ferme céréalière de 40 000 acres dans l’Ouest canadien. Maverick Ag est une entreprise qui s’appuie sur l’expertise financière de M. Shout. En 2022, elle a lancé Farmer Coach, un programme de mentorat entrepreneurial qui aide les producteurs à penser comme des chefs d’entreprise, peu importe l’envergure de leur ferme.

« En agriculture, le risque a explosé ces dernières années », déplore M. Shout, expert-comptable. « Flambée des coûts, volatilité des marchés, caprices de la météo, tensions géopolitiques : le secteur est pris dans la tourmente. »

M. Shout est convaincu qu’une approche entrepreneuriale s’impose pour affronter la situation. « Certaines fermes familiales valent des millions de dollars. Elles doivent être gérées comme des entreprises pour pouvoir encaisser les coups durs et profiter des occasions d’affaires. » Cela ne concerne pas le mode de vie des agriculteurs. « Fonctions, responsabilités, rémunération, reddition de comptes : autant d’éléments qui doivent être clairement définis dans le plan d’affaires », selon M. Shout.

Il rejette l’idée voulant qu’il existe des risques incontrôlables dans le secteur. « L’agriculture est souvent perçue comme un secteur d’activité distinct… à tort », poursuit-il. Comment se préparer aux fluctuations des marchés ? En connaissant ses coûts de production et ses seuils de rentabilité, ou encore en utilisant des programmes d’assurances, explique-t-il. « Maîtriser son avenir, c’est d’abord le planifier. »

Par son activité de mentorat, M. Shout aide les fermiers à adopter une approche entrepreneuriale. Il promeut les valeurs de base, la croissance, la formation, les ressources humaines et la gestion financière. Voilà les secrets de la pérennisation.

« Notre approche vise à responsabiliser les producteurs : nous leur donnons les outils et la vision stratégique nécessaires à une planification sur le long terme. Certaines actions, même modestes, comme le recrutement d’un responsable des ressources humaines, peuvent avoir un effet extrêmement positif. »

M. Shout insiste sur le rôle crucial de la planification dans la préparation de la relève. « Si vous intégrez des processus pour aider à préparer l’avenir, vous êtes déjà sur la bonne voie lorsque vous parlez de plans de transition », précise M. Shout.

Présentation du plan d’affaires

Professeur émérite de finance et de gestion des PME à Virginia Tech, expert-conseil financier à RBC et entrepreneur agricole, le Dr Dave Kohl assiste les entreprises agricoles depuis près de 45 ans.

« Dans le monde d’aujourd’hui, préparer l’avenir de son entreprise, c’est gérer ce que l’on peut contrôler et apprendre à composer avec les impondérables », explique M. Kohl.

De la géopolitique aux fluctuations météorologiques, en passant par les problèmes des chaînes d’approvisionnement, la pression des réseaux sociaux et le comportement des consommateurs, voilà de nombreux facteurs qui échappent à tout contrôle. « S’évertuer à essayer de gérer ces éléments est un travail qui ne peut mener qu’à l’épuisement », souligne M. Kohl. « Pour maintenir un équilibre psychologique, il est donc crucial d’élaborer des stratégies d’atténuation. Par conséquent, privilégiez les aspects sur lesquels vous avez une réelle emprise. »

Lorsque le risque est lié à d’éventuels tarifs douaniers et aux ruptures d’approvisionnement, M. Kohl insiste sur l’importance d’un plan de gestion des risques. Ce plan pourrait porter sur la fixation des prix, les coûts des intrants ou encore les taux d’intérêt.

Pour M. Kohl, on peut aussi préparer l’avenir en définissant des objectifs. « Nous devons nous recentrer sur l’essentiel afin d’administrer correctement nos entreprises », soutient-il. « Se fixer des buts permet de focaliser l’attention. Ma règle du 80-16-4 démontre que 80 % des organisations n’ont pas d’objectifs, que 16% y pensent de temps en temps et que 4 % seulement les consignent par écrit. »

Selon M. Kohl, les recherches démontrent que les entreprises qui documentent leurs objectifs sont quatre fois plus rentables et possèdent des ressources intellectuelles deux fois plus importantes. Selon lui, ces objectifs devraient couvrir les six aspects suivants d’une exploitation : professionnel, familial, personnel, psychologique, physique et spirituel. Ce sont les bases d’une entreprise agricole florissante.

Enfin, n’oublions pas l’importance d’un plan en matière de flux de trésorerie. M. Kohl souhaite que cette facette de la gestion d’entreprise revienne à l’avant-plan. Établir un plan de trésorerie peut paraître simple, mais beaucoup ne s’y attardent pas suffisamment. « Cette démarche vous force à maîtriser votre exploitation, c’est-à-dire la tarification, les coûts, les taux d’intérêt et le calendrier des entrées d’argent » soutient M. Kohl.

« De surcroît, elle favorise la clarté des conversations avec vos collaborateurs, vos investisseurs, votre conjoint et tous vos conseillers, un atout non négligeable pour faire face aux imprévus », poursuit-il.

Un plan d’affaires précis pour un avenir prospère

« Préparer l’avenir n’est pas une idée neuve, mais l’enjeu devient capital face aux multiples pressions qui s’exercent sur le monde agricole », affirme M. McClure, expert à RBC. Pour assurer la pérennité de votre exploitation, vous devez déceler les risques et prévoir des stratégies adaptées aux événements, qu’ils soient prévisibles ou non. Pour mettre en œuvre votre plan adapté aux défis de demain, communiquez avec votre conseiller RBC.

Le présent article vise à offrir des renseignements généraux seulement et n’a pas pour objet de fournir des conseils juridiques ou financiers, ni d’autres conseils professionnels. Veuillez consulter un conseiller professionnel en ce qui concerne votre situation particulière. Les renseignements présentés sont réputés être factuels et à jour, mais nous ne garantissons pas leur exactitude et ils ne doivent pas être considérés comme une analyse exhaustive des sujets abordés. Les opinions exprimées reflètent le jugement des auteurs à la date de publication et peuvent changer. La Banque Royale du Canada et ses entités ne font pas la promotion, ni explicitement ni implicitement, des conseils, des avis, des renseignements, des produits ou des services de tiers.

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Sujets:

Agriculture